«Malgré le dilemme – je suis pour le trift»

L’environnement et la biodiversité sont des sujets essentiels pour la conseillère nationale PS argovienne Gabriela Suter, âgée de 50 ans. Néanmoins, elle approuve la construction d’un lac de retenue sur le Trift dans l’Oberland bernois. Dans l’interview, elle explique pourquoi ce n’est pas une contradiction.

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La Suisse a surmonté l’hiver sans panne de courant majeure. La politique a-t-elle été trop alarmiste à l’automne?

Non, car on ne pouvait pas savoir que cet hiver serait si doux. Et il n’est pas encore terminé. Pendant les hivers à venir, nous devons également nous attendre à des phases où la situation électrique sera tendue.

Vous vous engagez beaucoup pour l’extension de l’énergie solaire. On dit précisément de cette technologie qu’elle a des faiblesses en hiver…

… faiblesses qu’il faut relativiser. La photovoltaïque a le plus fort potentiel d’extension en Suisse. Selon les calculs de l’Office fédéral de l’énergie, 67 térawattheures d’électricité pourraient être produits chaque année sur les toits et façades existants. C’est plus que ce que nous consommons aujourd’hui en Suisse. Nous devons enfin desserrer le frein et la développer massivement. Le parlement a posé quelques jalons et incité les investisseurs à construire des installations plus grandes.

Il y a cependant ce point faible durant les mois d’hiver – précisément quand l’énergie est limitée. Vous ne trouvez pas cela problématique?

Dans le Plateau, la photovoltaïque a trois mois faibles: décembre, janvier et février. Mais dans les montagnes, elle fournit même plus de courant en hiver qu’en été. C’est pourquoi nous avons également besoin d’installations solaires alpines.

Portrait de la conseillère nationale Gabriela Suter
Image: CH Media/Chris Iseli

En hiver, la force hydraulique et ses lacs de retenue ont traditionnellement un rôle plus important. Où les positionnez-vous dans vos réflexions?

La stratégie énergétique 2050 part du principe que la force hydraulique et la photovoltaïque deviendront les piliers les plus importants de notre système énergétique. Les deux technologies se complètent parfaitement. Plus nous avons d’installations photovoltaïques, mieux nous pouvons préserver les lacs de retenue et les «réserver» aux périodes où il y a moins de soleil.

Le projet sur le Trift dans la région bernoise du Grimsel est un projet de force hydraulique concret. Le trouvez-vous adapté?

Je dois d’abord souligner ce qui suit: j’attache une très grande importance au paysage de montagne et à sa biodiversité. Pour moi, ce sujet est donc un dilemme, pourtant j’approuve le projet.

Pourquoi un dilemme?

Dans la zone située avant le glacier du Trift, nous avons un paysage alluvial alpin encore pratiquement intact. Il serait inondé. D’un autre côté, il y a le point de vue politique: avec un lac de retenue supplémentaire, nous pouvons renforcer la sécurité d’approvisionnement en Suisse pendant l’hiver. À l’occasion de la «table ronde sur l’énergie hydraulique», fin 2021, 15 projets à poursuivre au total ont été identifiés. Le Trift est un de ceux qui disposent des plus grands potentiels. Je soutiens les résultats de cette table ronde malgré des réserves en tant que personne de sensibilité écologique. Parfois, il faut faire des compromis.

Image de Glacier du Trift, à l'arrière-plan se trouve le Triftsee
Image: KWO / Photo: David Birri

Vous êtes coprésidente du groupe parlementaire Biodiversité et protection des espèces. Et c’est justement sur ce thème que vous acceptez de faire des concessions en faveur de la sécurité d’approvisionnement. Dans quelle mesure avez-vous dû faire un effort sur vous-même?

Il y a effectivement des espèces rares sur le Trift: des mousses, des lichens, des champignons. On essaie de les déplacer. Je considère que c’est judicieux, sans ces mesures de compensation, je n’approuverais pas le projet. Revenons à la table ronde. Des associations de défense de l’environnement étaient également présentes. Nous nous sommes mis d’accord: pour chacun de ces projets, il faut des mesures de compensation et de substitution. Dans le cas du Trift, Kraftwerke Oberhasli a également fait des concessions concernant les débits minimaux résiduels: divers ruisseaux alpins n’alimenteront pas le lac de retenue. En tant qu’Argovienne, j’ai d’ailleurs un exemple intéressant au sujet des lacs de retenue et de la biodiversité.

Racontez.

Le lac de retenue de Klingnau date des années 30. Il n’est bien sûr pas directement comparable à des projets en montagne. À l’époque, il y a eu une grande résistance dans la région. On argumentait que des espaces de vie seraient détruits. Aujourd’hui, ce lac de retenue est une zone fréquentée par les oiseaux migrateurs, importante au niveau international et très riche en espèces. Je ne dis pas qu’un joyau naîtra aussi automatiquement sur le Trift. Mais il est possible que les mesures de substitution génèrent une plus-value.

GIF avec image alternée d'une simulation avec un lac de retenue plein et vide
Simulation du lac de rétention en contrebas du glacier de Trift lac de rétention en contrebas / Image: KWO / Photo: David Birri

Nous parlons de compromis. Ne manquent-ils pas trop souvent sur des sujets qui concernent à la fois la sécurité énergétique et la protection de l’environnement?

Depuis un an et demi, les différentes parties ont fait un grand pas l’une vers l’autre. La pression générée par la menace de pénurie énergétique a augmenté, on agit de manière plus pragmatique. L’ancienne conseillère fédérale Simonetta Sommaruga, en particulier, a beaucoup fait bouger les choses. Et il n’y a pas que dans la politique qu’on constate plus de volonté de compromis dans le domaine de l’énergie. La même chose est valable dans la population.

[Translate to bkw.ch: FR:] Porträt von Nationalrätin Gabriela Suter
«Avec un lac de retenue supplémentaire, nous pouvons renforcer la sécurité d’approvisionnement en Suisse pendant l’hiver. »
Conseillère nationale Gabriela Suter

Pourtant, il y a une nécessité d’agir concernant les énergies renouvelables.

Aujourd’hui, les procédures de planification et de construction de grandes installations hydrauliques et éoliennes durent souvent longtemps. Entre le début de projets majeurs et leur réalisation, jusqu’à 20 ans peuvent s’écouler. C’est pourquoi il est important de modifier les conditions-cadres. Le Parlement pose maintenant les bases.

Qu’est-ce qui devrait encore changer?

L’accord sur l’électricité avec l’UE reste un thème central. Même si nous renforçons la sécurité d’approvisionnement en Suisse, notre système ne peut pas être complètement autarcique.

L’ancien conseiller national PS Andrea Hämmerle a dit au début de l’année sur le site Internet «Seniorweb» qu’il était contre de nouveaux barrages. Dans le «SonntagsZeitung», d’autres femmes et hommes politiques se sont exprimés de manière critique. Quelle est votre position dans le parti au vu de votre attitude de compromis?

Dans une prise de position, le groupe du Palais fédéral s’est clairement exprimée en faveur des 15 projets de la «table ronde sur l’énergie hydraulique», donc également en faveur du Trift. Mais à condition que des mesures de compensation et de substitution soient prises. Il ne fait aucun doute que certains représentants du PS donnent plus de poids à l’atteinte au paysage. Nous sommes un grand parti et il y a de la place pour des opinions différentes.

Ce qui est prévu sur le Trift

BKW approuve l’extension de la force hydraulique et veut réaliser deux projets: la construction d’un barrage au glacier de Trift et une élévation du barrage du Grimsel. La priorité doit être donnée au projet du Trift, car il est plus avancé et permettra de produire 145 GWh de courant supplémentaire. Cette capacité d’électricité est extrêmement importante, en particulier pour l’hiver. Le courant supplémentaire pourrait être produit exactement lorsque la sécurité d’approvisionnement est menacée. S’il n’y a pas de recours, le permis de construire pourrait être octroyé en 2025. La construction devrait durer six à huit ans. Ensemble, les deux projets hydrauliques Trift et Grimsel seraient d’énormes batteries qui agrandiraient ensemble le stockage d’énergie de 455 gigawattheures.

Simulationsbild: Unterhalb des Triftgletschers liegt als Simulation der Triftstausee mit einer Staumauer

Un barrage près du glacier du Trift pour lutter contre la pénurie d'électricité en hiver

BKW souhaite investir dans des énergies renouvelables en Suisse: Un barrage au glacier de Trift permettant de générer 215 GWh d’énergie supplémentaire en hiver.

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