Le Waterloo des redevances hydrauliques

25.02.2019 — «Dernière bataille sur les redevances hydrauliques» titrait récemment la NZZ. Elle aurait mieux fait de se demander pour qui cette bataille serait un Waterloo. En effet, si les redevances hydrauliques ne baissent pas bientôt, il n’y aura que des perdants: les cantons alpins, les consommateurs et l’environnement.

 

La Suisse est considérée comme le château d’eau de l’Europe; cette forme d’énergie existe (encore) en quantité plus que suffisante. Cependant, comme pour chaque vache à lait, elle est exploitée jusqu’à ce qu’elle ne donne plus une goutte: les redevances hydrauliques exigés par les cantons d’implantation auprès des producteurs d‘électricité représentent une charge énorme. Pour le courant hydraulique, ils représentent un handicap compétitif sérieux, notamment par rapport à la production d’électricité d’origine fossile.

 

La force hydraulique prend du retard

De quoi s’agit-il? Les producteurs de courant hydraulique suisses, c’est-à-dire les exploitants de centrales hydrauliques et de bassins de rétention paye une redevance aux communes d’implantation pour l’utilisation de la ressource eau: la redevance hydraulique. Cette redevance a fait plus que décupler tout au long de son histoire plus que centenaire. Aujourd’hui, elle représente presque un quart du prix de revient moyen du courant hydraulique, contrairement à d’autres énergies renouvelables telles que le solaire ou l’éolien, où une telle redevance n'existe pas.

Toutefois, depuis l’introduction de la redevance hydraulique, le contexte économique et réglementaire a fortement évolué: aujourd’hui, les prix sur les bourses européennes déterminent la valeur de la ressource eau. La redevance hydraulique fixe actuelle ne prend pas en compte ce changement de paradigme. En effet, rien qu’au cours des dix dernières années, la redevance hydraulique a été augmentée de près de 40% – alors que les prix de l’électricité ont chuté de près de 60%.

La redevance est neuf fois plus élevée qu’en Allemagne

En Suisse, la charge des redevances est quatre fois plus élevée que la moyenne observée dans les pays européens pertinents pour le courant hydraulique suisse – et neuf fois plus élevée qu’en Allemagne. Du point de vue macroéconomique, la Suisse se met donc ainsi sur la touche par rapport aux pays où l’eau n’est pas taxée dans la même ampleur. Cette forme d’énergie n’est pas seulement pénalisée par rapport aux installations étrangères, mais aussi par rapport aux centrales au gaz ou au charbon. L’environnement est donc le premier grand perdant.

En effet, si les investissements dans la force hydraulique ne sont pas rentables, elle ne pourra pas se développer. Les communes et les cantons d’implantation sont les deuxièmes grands perdants. En fin de compte, ils se tirent trois fois une balle dans le pied: premièrement, aucun nouveau poste de travail ne sera créé sur place en raison d’un développement de la force hydraulique. Deuxièmement, aucune contribution n’est fournie dans les zones montagneuses contre les conséquences du changement climatique (glissements de terrain, recul des glaciers, etc.), et troisièmement, sur le long terme, les revenus tirés des droits hydrauliques disparaissent.

Espoir d’un abaissement par le Conseil national

Après que le Conseil des Etats n’a malheureusement pas réussi à abaisser la redevance hydraulique, tous les espoirs se portent dorénavant sur le Conseil national. Il est à espérer qu’il suive l’avis de la minorité de sa commission dans le cas de la loi sur les forces hydrauliques (art. 49 al. 1 LFH) et donc accepte un abaissement de la redevance maximale à 80 francs par kilowatt de puissance brute (80 CHF/kWB). Cela correspond à la phrase proposée par le Conseil fédéral lors de la procédure de consultation et à un retour à la situation de 2010.

Cette réduction est appropriée car les trois suppositions sur lesquelles reposaient les augmentations progressives instaurées en 2008 (augmentation des prix sur le marché de l’électricité, poursuite d’une hausse linéaire de l’inflation, poursuite d’une hausse linéaire des frais de construction) se sont toutes avérées fausses. De plus, la redevance hydraulique est depuis longtemps entièrement découplée de l’inflation nationale

La flexibilisation comme modèle d’avenir

Outre un abaissement de la redevance hydraulique maximale, il est nécessaire de disposer d’un nouveau modèle qui prend en compte d’une part que la charge repose aujourd’hui sur les producteurs actifs sur le marché et d’autre part, que la valeur de l’eau n’est plus régie par un compromis politique, mais qu’elle est déterminée par la formation du prix sur le marché européen.

Une redevance hydraulique flexible avec une part fixe et une part variable, dépendante du marché, tient compte de la situation actuelle et est équitable pour les deux parties. Une telle solution a été demandée par le Parlement lui-même en 2016, mais aussi en 2018 par une large alliance issue des milieux de l’économie, des consommateurs, des villes et du secteur de l’énergie. Cette solution à long terme doit s’accorder à la conception future du marché dans le cadre de la révision de la Loi sur l'approvisionnement en électricité (LApEl) et ne doit pas être reportée. Une absence de solution se transformerait en Waterloo pour tous les acteurs.

Assurer la compétitivité de la force hydraulique

Le Conseil fédéral évalue les investissements nécessaires à la rénovation et à la maintenance de la force hydraulique suisse à 30 milliards de francs entre 2010 et 2050. Si les investissements dans la force hydraulique ne sont pas rentables, elle ne sera pas améliorée. Les évolutions attendues à long terme pour les prix et la perspective d’un rendement raisonnable sont des facteurs décisifs. En leur absence, les investissements seront réduits au strict minimum et les grands investissements pour le renouvellement seront reportés.

Certes, le creux de la vague au niveau des prix est pour l’instant derrière nous grâce à une hausse à court terme des prix sur le marché de l’électricité. Toutefois, la situation n’est pas comparable au contexte de prix élevés de 2008. De même, d’après les prix actuellement attendus sur le marché, aucune augmentation notable n’est en vue.

Les producteurs de courant hydraulique suisses, c’est-à-dire les exploitants de centrales au fil de l'eau et de centrales à accumulation paient une redevance aux communes d'implantation pour l’utilisation de la ressource eau: la redevance hydraulique. Cette redevance a fait plus que décupler tout au long de son histoire plus que centenaire. Aujourd’hui, elle représente presque un quart du prix de revient moyen du courant hydraulique, contrairement à d’autres énergies renouvelables telles que le solaire ou l’éolien.

Toutefois, depuis l’introduction de la redevance hydraulique, le contexte économique et réglementaire a fortement évolué. Aujourd’hui, les prix sur les bourses européennes déterminent la valeur de la ressource eau. La redevance hydraulique fixe actuelle ne prend pas en compte ce changement de paradigme. En effet, rien qu’au cours des dix dernières années, la redevance hydraulique a été augmentée de près de 40% – alors que les prix de l’électricité ont chuté de près de 60%.

En Suisse, la charge des redevances est quatre fois plus élevée que la moyenne observée dans les pays voisins, Norvège et Suède en sus – et neuf fois plus élevée qu’en Allemagne. Du point de vue macroéconomique, la Suisse se met donc ainsi sur la touche par rapport aux pays où l’eau n’est pas taxée dans la même ampleur. Cette forme d’énergie n’est pas seulement pénalisée par rapport aux installations étrangères, mais aussi par rapport aux centrales au gaz ou à charbon.

 

Une baisse est appropriée car les trois suppositions sur lesquelles reposaient les augmentations progressives instaurées en 2008 (augmentation des prix sur le marché de l’électricité, poursuite d’une hausse linéaire de l’inflation, poursuite d’une hausse linéaire des frais de construction) se sont toutes avérées fausses. De plus, la redevance hydraulique est depuis longtemps entièrement découplée de l’inflation nationale.

 

La réglementation actuelle avec une redevance hydraulique maximale rigide date de l’époque du monopole et ne répond plus aux impératifs du XXIe siècle. Premièrement, depuis l’ouverture partielle du marché en 2009, la redevance hydraulique n’est plus portée solidairement par tous les clients finaux dans le cadre des prix de revient. A la place, la charge est assumée par les producteurs présents sur le marché. Deuxièmement, la valeur de l’eau ne peut plus être régie par un compromis politique, elle est déterminée par la formation du prix sur le marché européen.

Une redevance hydraulique flexible avec une part fixe et une part variable, dépendante du marché, tient compte de ces deux changements de paradigme et est équitable pour les deux parties. Une telle solution a été demandée par le Parlement lui-même en 2016 en 2018 par une large alliance issue des milieux de l’économie, des consommateurs, des villes et du secteur de l’énergie. Cette solution à long terme doit s’accorder à la conception future du marché dans le cadre de la révision de la LApEl et ne doit pas être reportée.

Tout comme une vaste alliance, BKW demande une adaptation du régime actuel des droits hydrauliques. Avec l’Association des entreprises électriques suisses AES, AEE Suisse (Organisation faîtière de l’économie des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique), economiesuisse, l’Union suisse des arts et métiers, le Forum des consommateurs, l’Union des villes suisses et Swissmem, elle demande une modernisation de la redevance hydraulique.

Le 14 mars, l’alliance a demandé de suivre une approche basée sur trois points: premièrement, il est nécessaire de flexibiliser la redevance hydraulique avec une part fixe et une part variable, dépendante du marché. Cette flexibilisation doit être inscrite dans la loi en tant que principe à compter du 1er janvier 2020. Deuxièmement, la révision de la loi sur l’approvisionnement en électricité et les modalités futures du marché doivent apporter une solution à long terme à la question des droits hydrauliques. Troisièmement, comme solution transitoire, la charge qui pèse sur la production de courant hydraulique devra être significativement allégée à partir de 2020.

BKW se prononce en faveur de l’initiative parlementaire Rösti «Développement de la production d’électricité d’origine hydraulique. Revoir la situation de référence des études d’impact» (16.452). Elle s’est exprimée en conséquence  dans le cadre de la procédure de consultation.

Nous soutenons les modifications de l’art. 58a al. 5 LFH proposées par la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil national CEATE-N. Ils tiennent compte de l’importance capitale de la force hydraulique dans l’approvisionnement en électricité de la Suisse et s’intègrent dans les objectifs de la Stratégie énergétique 2050. Celle-ci présuppose que la production de courant hydraulique puisse être maintenue et développée.

Nous rejetons l’art. 58a al. 6 LFH supplémentaire proposé par une minorité à la commission. Cet alinéa demande des mesures de substitution supplémentaires, indépendamment d’interventions concrètes, et sape ainsi l’amélioration et la clarification des bases juridiques prévues par l’art. 58a al. 5 LFH.